La reproduction des basses fréquences (inférieures à 100 Hz) a toujours été l’objet de recherches spécifiques dans le monde de l’audio. En effet, générer des ondes acoustiques de basses fréquences demande de déplacer beaucoup d’air, au moyen de haut-parleur à longue excursion ou de grande taille.

De nombreuses méthodes ont été trouvées afin d’augmenter l’efficacité de la reproduction et de limiter les dimensions des systèmes (on parle de charge acoustique pour désigner l’environnement dans lequel le haut-parleur rayonne). Entre autres, les charges passe-bandes, les pavillons, les lignes à transmission… et surtout, la plus utilisée, la charge dite bass-reflex. Elles ont bien sûr toutes leurs avantages et leurs inconvénients, en termes de taille, de fidélité, de facilité de conception etc.

Le bass-reflex
Le bass-reflex est la charge la plus répandue, que l’on retrouve dans tous types de systèmes, en hi-fi ou en sonorisation, en entrée comme en très haut de gamme. Elle permet d’étendre la réponse en fréquence d’un haut-parleur dans le grave, sans trop solliciter ses capacités thermiques et mécaniques. Le principe est simple : c’est celui d’une bouteille de bière qui résonne à une fréquence donnée lorsque l’on souffle dedans, c’est la résonance de Helmholtz, dont la fréquence dépend du volume de la cavité et de la longueur et surface du col de la bouteille (que l’on nomme techniquement l’évent), selon la formule : f = c/2π x √(A/(V.L)), où "c" est la célérité du son, "A" la surface de l’évent, "L" sa longueur et "V" le volume de la cavité. On déduit de cette équation que plus la cavité et la longueur de l’évent sont grandes, et plus la surface de l’évent est faible, plus la fréquence sera basse. Il suffit de remplir partiellement la bouteille de bière pour se rendre compte que la fréquence augmente. C’est l’équivalent acoustique d’un système mécanique masse-ressort : l’air dans la cavité se comprime et se décomprime, comme un ressort, et l’air dans l’évent se déplace avec une certaine inertie, comme une masse.

## Système masse-ressort classique

A la fréquence d’accord de l’évent, le haut-parleur vibre très peu, et c’est l’air dans la cavité qui vibre et rayonne par l’évent.
Bien accorder un bass-reflex (c'est-à-dire choisir les dimensions de chacun des composants en fonction du haut-parleur et de la réponse souhaitée) n’est pas toujours chose aisée, et les résultats sont parfois peu convaincants : une réponse exagérée en basse fréquence qui résulte en un effet « tonneau » désagréable est le résultat typique d’un bass-reflex mal accordé, plus de basse, mais qui s’accompagne d’une mauvaise définition, de trainage… non satisfaisant ! Un bass-reflex bien accordé au contraire permet une réponse claire, profonde dans un volume réduit.

Non-linéarité de l’air
Mais tout n’est pas si simple. En effet, bien accorder un bass-reflex est un premier pas, mais il y a plus. La pression dans l’évent peut être très importante, ce qui conduit à une vitesse de déplacement de l’air très élevée, et a un comportement non-linéaire de celui-ci. Contrairement à la réponse linéaire (que l’on peut modéliser avec des équations simples ou avec n’importe quel logiciel de simulation d’enceinte), les effets non-linéaires sont complexes et souvent contre-intuitifs, et nécessitent l’utilisation de modèles mathématiques complexes, tels que la méthode des éléments finis (FEM) pour décrire des phénomènes d’acoustique visco-thermique.
Mais surtout, ces phénomènes non-linéaires – typiquement à partir de 145 dB SPL - posent de gros problèmes de reproduction sonore. Le plus connu d’entre eux est le bruit d’écoulement : l’air dans l’évent crée du bruit qui s’entend, et gène l’écoute. D’autres phénomènes existent, et nous allons parler d’un en particulier : la compression.

## (A gauche) Comportement linéaire à faible niveau / (A droite) Apparition de turbulences à fort niveau

En première approche, un système audio est linéaire : c'est-à-dire que la pression sonore générée est proportionnelle à la tension électrique aux bornes du haut-parleur – on parle de comportement en petits signaux. C’est vrai jusqu’à une certaine tension, mais à fort niveau la relation de proportionnalité ne tient plus : la pression sonore générée augmente moins rapidement que la tension d’entrée : on gaspille alors de la puissance électrique et de la distorsion apparaît. Le premier responsable est le haut-parleur (du fait de l’échauffement de sa bobine par le courant électrique, de la variation de la force de Laplace, de l’inductance et de la souplesse des suspensions avec le déplacement de la bobine), mais il n’est pas le seul.

Limiter les turbulences
En effet, comme l’on a vu, la forte pression et la vitesse élevée de l’air dans l’évent sont sources de problèmes, en particulier de tourbillons qui dissipent de l’énergie acoustique sans créer d’ondes sonores. On dit alors que le flux n’est plus laminaire, mais turbulent. Il en résulte une compression qui peut être très importante, de l’ordre de plusieurs décibels. Enorme perte d’énergie. Dans l’exemple donné, l’évent rectangulaire génère, pour une puissance électrique de 50 Watts (20 Volts et impédance 8 ohms), presque 30 % moins de pression que l’évent polynomial. Plus la puissance électrique augmente, plus le pourcentage est élevé.

## Comparaison de la compression à différents niveaux d'entrée

Pour lutter contre ce phénomène, Pikip a choisi deux stratégies : la première permet de conserver une vitesse particulaire faible, en privilégiant des évents très larges, ce qui résulte en de très faibles bruits d’écoulements, absolument inaudibles.
De plus, les évents Pikip ne sont pas de simples évents rectangulaires comme souvent vus, mais ont un profil bombé (dont la courbe est polynomiale) qui, sans rentrer dans des détails techniques de mécanique des fluides, permet de réduire largement la séparation inertielle des couches limites, c'est-à-dire l’apparition de tourbillons.

## Event polynomial PikiP

Tout cela nécessite un grand soin dans la conception et l’optimisation, qui passent par des simulations poussées et du prototypage précis, et les résultats sont notoires : très faibles compression et distorsion, c'est-à-dire une réponse en fréquence et une signature sonore identiques quel que soit le niveau d’écoute, et un rendement qui ne chute pas quand la puissance est élevée (là où il est primordial). La faible vitesse particulaire et le flux laminaire contribuent à une réponse claire, profonde, sans distorsion, et plein de détails. On gagne donc à la fois en qualité de reproduction, et en autonomie !